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4 août 2008 1 04 /08 /août /2008 05:07
 

La liberté est dans le ciel, du moins il paraît, espace sans frontière, et pourtant il est une limite, celui qui y vit veut monter plus haut, encore et toujours, il cherche à s'échapper mais son organisme ne peut le supporter, sa respiration devient difficile, ses plumes se chargent de glace, le froid envahit ses poumons, ses yeux se figent, ses muscles se tendent, absorbant trop d'énergie pour un effort infime. Alors il redescend, étend ses ailes, les réchauffant au soleil, une pluie de cristaux se perd dans l'espace en brefs scintillements, sa respiration se fait plus facile, une nouvelle douceur le nourrit, lui redonnant satisfaction et désespoir, satisfaction d'avoir survécu, désespoir d'un effort vain, d'une envie de s'en aller, de s'échapper, d'oublier, de s'oublier…


Ces questions n'intéressent pas l'homme qui se promène seul. Il est venu en pleine campagne pour ce calme, pour s'éloigner temporairement, il ne supporterait pas le manque longtemps, de l'air pollué et de la vie stressante de la ville.

Regardant autour de lui il feuillette dans sa mémoire les pages jaunies de son enfance, de ces séjours en colonie de vacances, de ces instants où les soucis n'existaient plus, où la vie était sans question, sans obligation autre que de manger, dormir, jouer.

Il se sent bien, son corps n'est pas celui d'un sportif, il a perdu l'habitude de marcher longtemps, l'air trop pur lui monte à la tête, sans difficulté, il mesure à peine un mètre soixante. Ses pieds sont plus habitués à fouler les tapis de prix que le sol dur et parfois agressif de ces chemins de campagne fait pour les sabots plus que pour de petites chaussures de toile. Bien sûr il aurait pu rester chez lui, se contenter de regarder la télévision, de téléphoner à sa femme, ou à sa maîtresse, mais il est en congés pour une semaine. Plus il ne pourrait pas. Quelques jours de silence, mis à part les cris et les rires des bestioles autochtones, pour faire le plein d'énergie avant de retrouver une ville qu'il affectionne, quoi qu'il en dise, des contraintes qu'il adore, s'il devait être face à lui-même durant trop longtemps, et sept jours sont une limite, il serait confronté à un vide tel qu'il n'y survivrait pas, qu'il ne penserait pas pouvoir s'y retrouver, pouvoir aller plus loin.

Quelques jours, seulement, pour mourir !

C'est peu pour s'y préparer quand on le sait, mais l'ignorer est-ce plus facile pour lui qui pense à l'avenir, envisage de nouvelles affaires, de nouveaux calculs, il se voit loin, loin…

Mais pas au bon endroit !

Une intuition lui fait lever la tête, le soleil qu'il toise lui blesse les yeux, trop habitués aux lumières factices il souffre, mais peu importe. Il a cru distinguer quelque chose là-haut, une forme étrange, comme quand il était enfant, qu'avec ses copains ils regardaient l'immensité, cherchant des oiseaux, s'amusant à leur donner des noms sans rapport avec le vrai. Pour ce qui est de celui-là il n'en voit pas, du reste il ne pense plus à ce jeu, c'est son inconscient qui lui fit lever les yeux, lui croit que c'est pour contempler un animal magnifique, qu'il n'admire pas, qu'il n'envie pas davantage, et pourtant, voler, n'est-ce pas être libre ?

Si seulement cette limite disparaissait, s'il était possible d'aller plus haut, plus loin sans se heurter à cette barrière insupportable d'être insurmontable, que l'on voudrait… Impossible ! Redescendre, replonger dans un réel oscillant entre habitudes et banalités, se souvenir d'une forme minuscule entrevue et sourire de ce spectacle.

L'homme s'est arrêté, il observe la forme tournant au-dessus de lui, il en distingue les couleurs magnifiques, accrochant la lumière comme si elle était paré de bijoux magnifiques, il regrette seulement de n'avoir pas pris d'appareil photo, immortaliser le moment aurait prouvé que la nature n'avait pas de secret pour lui, et pourtant…

L'étrange oiseau se rapproche, l'homme le regarde, conquis par sa beauté et sa puissance, par une intuition étrange, par un désir nouveau, si seulement ses bras adipeux se transformaient il s'élèverait, disparaîtrait dans l'immensité, si seulement…

Vraiment, c'est impossible ?

Plus près encore ! Il se dit que ce doit être un rapace, aussi grand, énergique, des ailes si bien dessinées, des serres capables de prendre n'importe quel animal, n'importe quel...


Il sourit alors que l'être se rapproche, le soleil est brûlant, la clarté envahit ses yeux, noie son esprit, il oublie le passé, l'avenir, ce qu'il espérait ou redoutait, il n'y a plus désormais devant lui qu'un ciel sans fin, que cette ombre sublime. Ses oreilles n'entendent plus que le vent qui chante autour de lui, qui murmure, semble rire. Il ferme les yeux, la lumière ne disparaît pas, elle l'aspire, elle l'absorbe.

Il ne ressent aucune douleur quand le décor disparaît, gommé, il est bien, il est…


Là-haut, loin, loin…


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commentaires

A
J'ai bien aimé, c'est tout en poésie et non-dits.<br /> Et puis, j'ai vu que la Belgique et le 6ème pays à être touché par ton blog.
Répondre
L
<br /> <br /> La conquête du monde est affaire de patience !<br /> <br /> <br /> <br />

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Bienvenue sur ce blog ! Vous y découvrirez mes goûts, et dégoûts parfois, dans un désordre qui me ressemble ; y partagerez mon état d'esprit au fil de son évolution, parfois noir, parfois seulement gris (c'est le moins pire que je puisse faire !) et si vous revenez c'est que vous avez trouvé ici quelque chose qui vous convenait et désirez en explorant mon domaine faire mieux connaissance avec les facettes les moins souriantes de votre personnalité.

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