J'ai oublié le temps, j'ai oublié l'avant,
L'époque ou mon cœur battait, où je respirais.
J'ai oublié qu'un jour le monde des vivants
Était le mien, où je pouvais y avancer. .
J'ai été un enfant, suis devenu un homme,
Eu femme et descendants, je peux l'imaginer.
Mais un sort intervint, à l'instar d'une gomme,
Dévorant mon vécu, dissolvant mon passé.
Les dieux ont tout pouvoir de jouer avec nous,
Simples humains qui n'ont d'autres choix qu'accepter
De n'être que des pions, des esclaves à genoux
Suivant les destinés qu'ils nous ont imposés.
Qu'ai-je fait, contre qui, à qui ai-je déplu,
Un blasphème aurait-il échappé à ma bouche ?
Je peux bien y penser, je n'en saurais pas plus,
Demain n'existe pas, hier n'existe plus.
Tous les morts n'ont pas droit de venir avec moi,
Dans la foule des défunts attendant sur la rive
C'est mon bon gré seul qui dirige mon choix.
Ici tous sont égaux, pas un seul qui m'esquive.
Mériter n'est pas tout, il y a un péage
De une à trois oboles qu'il convient d'acquitter
Celui sans les moyens de payer son passage
Restera sur le bord pendant l'éternité.