LA MÉCANIQUE DE L'OMBRE

Thomas Kruithof – 2016 – 93' 

Duval est employé dans une grande entreprise, très efficace, sérieux, incapable de refuser un travail, il est celui à qui on en demande toujours plus. Cela ne pouvait pas durer et quand on lui en demande trop, il pète les plombs, et se retrouve deux ans plus tard à éplucher les petites annonces, à envoyer des CV, à répondre à des convocations dont il sait qu'elles seront vaines.

Il a ses habitudes, les suit jour après jour dans son petit appartement d'un grand ensemble. Un soir il reçoit un appel qui le surprend, un homme lui demande de venir dès le lendemain dans une des tour de La Défense, il veut lui proposer un emploi mais ne souhaite pas en dire plus au téléphone.

Duval n'a rien à perdre aussi se rend-t-il à la convocation. Le samedi matin le quartier est quasi désert, il trouve sans difficulté la bonne adresse, l'étage correct, le bureau où il est attendu par un homme qui se présente comme Clément, rien de plus ni de moins.

La proposition va le surprendre, il s'agit de transcrire avec une machine à écrire, et surtout pas un ordinateur, des bandes magnétiques qui lui seront fourni quotidiennement. Le cadre est bien établi, ouvrir les rideaux en arrivant, se mettre au travail, ne pas fumer, ne pas sortir, ne pas ouvrir si quelqu'un sonne, et fermer les rideaux avant de partir. Duval s'interroge mais se garde bien d'en demander davantage par crainte que la place ne lui passe sous le nez, la paie est bonne et le job s'il est fastidieux n'est pas compliqué.

En écoutant les premières bandes il comprend que ce sont des conversations téléphones qui sont surprises, il reconnaît des noms, une affaire de prise d'otages à l'étranger, un intermédiaire dont parlent les médias régulièrement. Il hésite, conscient de faire quelque chose à la frontière de la légalité, ses doutes grandiront quand il entendra un crime, un coup de feu, le bruit d'un corps qui tombe... mais il a mis le doigt dans un mécanisme dont sortir est difficile, des ombres le suivent, lui-même essaie d'en savoir plus, il rencontre un homme inquiétant, son supérieur direct, qui vient le voir régulièrement, à qui il parle de son désir d'arrêter... un homme qui va l'entraîner, sous la menace, dans une action périlleuse au cours de laquelle un homme sera tué sans que Duval sache que la scène a été filmée, ce dont il se rendra compte quand il sera interrogé par la police, en la personne du commandant Labarthe.

Il finit par tout lui avouer. Labarthe lui propose de garder son travail et de copier ce qu'il transcrit, il affirme à Duval qu'il ne court aucun risque. Ce dont celui-ci doutera quand il entendra l'enregistrement de cette même conversation... Duval prend peur, d'autant que lors d'une réunion des AA il a fait la connaissance d'une belle étrangère qui ne semble pas insensible à son charme.

L'étau se resserre, il en sait trop...

Le monde de l'espionnage ressemble-t-il à cela ? Dans certaines imageries populaires probablement, ce qui ne veut pas dire qu'elles aient tort. Cluzet est impeccable, mais quand ne l'est-il pas, entouré par Denis Podalydès, Sami Bouajila, Simon Abkarian, Alba Rohrwacher... La réalisation est au plus près des personnages, dans des décors minimalistes et des dialogues réduits à l'indispensable. Tout est en clair obscur, mais surtout obscur en ce qui concerne le rôle exact des uns et des autres ou la crédibilité des situations. Heureusement quelques explosions de violence viennent secouer le spectateur.