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14 mai 2010 5 14 /05 /mai /2010 06:00

Qui regarde l'abîme... 14

 

 

lobotomie-fusion-04.jpg

 

 

                                                       15

 

Non, pas entre les deux, je suis les deux, et plus, trop, elles sont moi et me font souffrir d’être en vie, de regarder le ciel et de le voir, de sentir le soleil mais d’apprécier les ténèbres. L’une est l’inverse de l’autre et la vie se tient avec les deux, au contraire de ceux qui, à tout nier, ne sont que des instincts, des rites, moins que des animaux : des bêtes !

La nuit sera longue, l’éclair zèbre le ciel de l’esprit s’imaginant dans un cadre connu, rassurant, mais celui qui apparaît à la faveur de l’orage est différent, inquiétant mais prometteur. L’un ne va pas sans l’autre.

Paysage macabre, je connais, j’y suis à l’aise, tant de cadavres parsèment ma route sur fond de larmes et de désespoir. Complices et amicaux je n'ai confiance qu’en eux. Réceptacle corrompus, charognes muettes entendant mes secrets, elles ne les répéteront qu’à l’éternité !


 

- Mourir ou naître, là est la question !

- Oui, il y a plus de choses…

- Trop ! J’ai envie de mots, d’oublier cet endroit étrange et maudit.

- Vous y êtes venu de votre plein gré.

- De mon plein gré… On dirait l’invitation faites aux vampires, serais-je une victime devant monter d’elle-même sur l’autel !

- Nous semblons ce que nous ne sommes pas, sommes de conventions culturelles, sociales et éducatives sous lesquelles la véritable personnalité se terre. C’est elle qui est à sacrifier, sans intervention extérieure magique et manipulatrice. A chacun, face à soi, d’affronter sa vérité.

- Naître et mourir ! Cela me concerne. Risquer, gagner et puis perdre.

- N’ayez pas hâte que la nuit finisse. Il serait souhaitable qu’elle ne cesse jamais, nous resterions à bavarder en oubliant le temps et ses menaces.

- Un rêve.

- Ou un cauchemar ! Ce serait vivre avec la peur, avec la hantise du lendemain, je désire avancer, savoir. Savoir quoi, ça...

- Vous êtes là pour ne plus fuir ?

- Surtout.

- On ne peut échapper à soi-même.

- C’est vrai, on peut le vouloir, l’espérer, réussir un moment !


 

Mais pas plus ! Ensuite il faut accepter, à genoux chercher qui supplier, ne trouver que soi, qu’en soi. L’autre est halluciné. N’a de valeur que ce qui est à l’intérieur. Cette porte donne sur tant de mondes, je l’ai ouverte si souvent, errant en des univers étranges, pataugeant dans le sang, écrasant des cadavres, besognant des charognes, tout cela pour me perdre, tout cela pour effacer.

Tout cela pour rien !

Regrets ?

Éternels !

Espoir fallacieux, ! Oubliant le motif de ma fuite je fis un tour complet. La vie est sphérique, courir ramène au départ. Ainsi suis-je revenu vers moi, épuisé au point d’être incapable d’éviter la confrontation, maintenant…

Main tenant ?

Celle qui prit la mienne se retira, ainsi la mer reculant laissa apparaître des vérités atroces et succulentes, horribles mais nourrissantes. La maudire ? Non, je l’ai haïe un temps mais avec le recul je la remercie par ce quelle laissa en moi des cendres d’un amour que je crus possible, voulus bénéfique ! Chimère, masque embellissant la réalité organique. Reste la douce amertume du mépris. Comment se faire comprendre de l’autre quand on ne se connaît pas ? L’image que je montre me coûte de plus en plus d’efforts, bientôt je ne pourrais plus la maintenir et dans leurs yeux effrayés enfin je découvrirais ma véritable nature en une première mais ultime seconde de véritable lucidité !

Logique ! Je le sais, mais j’ai tant à comprendre, j’étends à comprendre…

 

- Vient l’heure du rendez-vous, de la prise de conscience, d’arracher le mensonge et, face au miroir, de tenter de supporter ce que l’on est !


 

Ce que l’on hait ? Mais la haine a disparu, la rage s’estompe alors que la sérénité s’approche précédé du renoncement, son triste compagnon ! Me satisfaire de ce que je suis !

 

- C’est une confrontation rarement préméditée. Qui part en quête de soi porte en lui l’image de ce qu’il espère découvrir. La solution est dans la confrontation au moment où la conscience s’y attend le moins. Nue elle ne peut compter que sur elle-même !


 

Est-ce vrai ? J’ai envie, j’ai peur… Vie, peur, vieux mots complices. Momifiés ils s’effritent sous mes doigts, reste le souvenir, les impressions, reste… MOI !


 

- Finalement commissaire j’aimerais que se passe quelque chose.

- Je n’en doute pas, ne soyez pas impatient.


 

Si, si ! En savoir plus, un peu, aller de l’avant, m’approcher, voir, toucher, prendre dans mes mains, ne jamais céder et affronter l’éternité.

C’est n’importe quoi ! Toiles d’araignées qui ne me retiendront pas, liens avec une démence simulée, vieillarde ridée, moribonde, comment ai-je pu m’accoupler avec ça ?


 

- Je ne le suis pas, enfin si, un peu, le temps est si lent.

- Il est relatif. L’instant est dense, nous percevons chaque seconde, le temps ne change pas, c’est notre perception qui se modifie, notre acuité.


 

Je voudrais… Mais il a raison.

Il ? Moi ? Mais lequel ? Celui que je suis, que je crus être ? La réalité est-elle à définir ou à accepter ? Que crains-je de retrouver, de rencontrer, d’apprécier peut-être, mais en mettant les choses au pire !

C’est pour rire, enfin, je crois !


 

- Plus d’éclair, tout est-il fini ?

- Il y a tout juste deux minutes qu’il y eut le premier.

- Seulement ?

- Je le sens, je ressemble au concepteur de cette maison, elle me parle.

- Que va-t-il arriver commissaire ?

- Comment savoir avant ? Imaginer serait une perte de temps, acceptons ce qui vient, ce qui est là, cette force terrible qui nous guette.

Un nouvel éclair déchira les consciences, le paysage parut autre, un désert immense s’étendait devant la maison, au loin des montagnes se découpaient sur un ciel sans limite. La lumière s’éteignit dans la maison, l’air se mit à chantonner une curieuse mélopée, une douce vibration...

Inquiétude incarnée ! Le silence avait cette densité qui n’appartient qu’aux rêves, les quatre hommes écoutaient, égaux devant l'insondable mystère, devant une violence spontanée, naturelle, dénuée d’âme, imprévisible.

Étaient-ils encore dans cette maison ? Aucun ne l'eut affirmé. Les lèvres restèrent close comme si un murmure pouvait sembler un appel ! Comme si un nom était une invitation ! La curiosité est bridée par la peur quand elle sent un trop grand risque de déchaînement de violence !

Il y eut des bruits, des murmures, des heurts comme si l’on traînait des corps, une séquence du passé remontait à la surface. La télévision aime ces séquences, le héros voit une séquence qui s’imprima sur la trame du temps en image de sang !

Les cris se rapprochèrent les sons se firent plus clairs, plusieurs langues s’affrontaient, une indienne mais l’autre n’était pas l’anglais, même celui du dix-huitième siècle ! C’était autre chose de plus étrange encore.

Instinctivement les quatre hommes s’étaient rapprochés, les ténèbres étaient totales mais ils se rassuraient et le commissaire se demandait ce qui allait resurgir. Quoi, de quand et ensuite, cela cesserait-il ?

Il y eut comme une lumière, rapide, floue, tremblante, mal réglée, trop lointaine encore mais elle allait revenir et cette certitude plus effrayante que le reste était source d’une terreur croissante et savoureuse.

Des voix nombreuses, des suppliques, pas besoin de comprendre une langue pour le percevoir, les intonations trahissent les pensées, dévoilent les sentiments par delà le barrage de la langue.

Réponse négative, la sentence était donnée, il importait de l’exécuter.

Quelle sentence ?

Pourquoi poser la question ? Un jugement équitable ne traverserait jamais le temps ainsi, non, c’était l’atroce qui attendait avec son sourire d’effroi.

La lumière revint, frémissante, arborant un sourire traduisant le plaisir de ce qu’elle était, de ce qu’elle recelait.

Les cris résonnaient, montant en puissance, ils s’éteignirent d’un coup avant de revenir pires encore. Le refus s’exprime simplement !

La lumière dessinait un cercle sur le sol, ils se regardèrent, sans se voir le résultat fut pourtant le même, l’envie d’en savoir plus, ils étaient conviés à un spectacle sans pouvoir le refuser, lui dire non pourrait lui déplaire et eux être amenés à rejoindre les damnés qu'ils entendaient.

Un puits gorgé de lumière, elle s’adapta aux spectateurs, comme si, primitivement, elle n’avait pas été conçu pour eux.

Ils virent et reculèrent.

Même le commissaire ferma les yeux, c’était plus que ce qu’il pensait. Bien sûr lui savait à quoi s’en tenir mais le voir, le VOIR !


 

Des hommes ? Plus vraiment ou si peu mais pourquoi leur arracher ce qualificatif qui est tout ce qui leur reste d’une dignité dont la perte fait partie de la condamnation ! Que ce soit celui qui se tient debout contre un mur ou celui qui vient d’arriver, qui tremble, à genoux, frappant la porte close derrière lui, il sait qu’elle ne se rouvrira pas, conduit là ce n’était pas pour en être retiré, ce n’est pas pour lui faire peur, ou pas vraiment, ou …

Si !

Bien sûr ! C’est cela, il le sent, le sait, ni pourquoi, ni comment. La peur, son père l’aimait, il n’avait pas compris, pas senti les fils, pas réalisé.

Vraiment ?

Et si, au contraire, il avait fini par le ressentir, par laisser la lucidité l'envahir, s’il avait demandé à son fils une chance ? Mais laquelle ?

Plus tard ! Pour l’heure il fallait regarder, ils ne risquaient rien, ce n’était que du… Du passé ? Mais il est là, il est impossible que ce soit demain, il est la certitude de ce qui fut, au travers des opinions, des idées, des intentions, loin des craintes et des traductions. Quand il palpite devant soi. La gueule impitoyable de l’évidence se referme. Admettre en espérant conserver sa raison, non pas "comme avant" mais la moins tremblante possible ! Hurler est parfois notre seule chance de briser le suaire de panique qui nous étouffe.

Des corps, des d’ossements ici, des excréments ailleurs, le puits semble immense mais de l’intérieur il doit être d’une petitesse insoutenable.

Ce qui se passe là ?

L’homme debout s’approche du nouveau, il connaît les règles, l’autre aussi, qui le voyant venir hurle de plus belle et tente de s’éloigner, course vaine quand la peur vous noue le ventre, quand la folie voile vos yeux il ne reste qu’à supporter, qu’à endurer, à espérer que tout aille vite, que tout soit achevé et que la mort apporte un soulagement mérité !

Le duel n’a pas lieu, comment se battre sans le désirer vraiment ?

Il ne peut pas lutter, il ne veut plus, il doute d’être là, ainsi l’esprit parfois apporte-t-il le soulagement à qui ne peut accepter son sort, ainsi efface-t-il, mais attention, cela revient, cela remonte, le pire revient, comme ce puits remontant de la nuit des temps pour imposer sa vérité, SA vérité !


 

Sa vérité ? Mais qu’est-ce que c’est ? Ce mot a-t-il un sens ? Je sais que… oui, je connais ce puits, j’y fus confronté, mais y revenir veut dire que je ne sais pas tout, que je n’ai pas tout compris, qu’il reste à admettre.

Quoi ?

Le pire !

Seul le pire peut sortir de cet endroit, de cette vision infernale, de ce que cette haine exprime de rage, mais aussi d’instinct de conservation. Vivre, vivre à tout prix, peu importe comment, peu importe s’il faut manger l’autre, s’il faut dévorer une partie de soi pour durer, un jour la porte se rouvrira, un jour l’opportunité de sortir se présentera, et si ce n’est pas par le haut, ce serait par le bas.

Un jour, ou une nuit, en un long voyage, en des années d’errance, de folie furieuse, en des années d’attente pour une solution enfin proche.

Par en haut ou en bas ?

Ai-je dévoré pour survivre ou fut-ce l’inverse ? Je me suis laissé dévorer, absorber, j’ai offert mon émotion, ma souffrance, mes larmes, j’ai ouvert mon cœur, mon esprit, ainsi, insidieusement, je prenais l’autre, l’utilisais, c’est le mot, me nourrissant sans prendre mais en donnant. C’est l’explication que je cherche depuis longtemps, que j’espère depuis des années, celle… La vraie, la sortie !

Donner est plus intéressant, plus nourrissant, libérateur car l’autre ne prend que l’inutile. Elles m’aidèrent à rejeter le superflu, à… Me purifier ? Non, je déteste la pureté ! À me densifier, le terme est plus adéquat, plus proche de ce que je ressens.

Je ressens, je re-sens !

Je n’ai rien vécu d’inutile, ce que j’ai abandonné ne fut pas une perte.

Au contraire.


 

Les quatre hommes regardent de nouveau, l’image se déforme, comme au cinéma, redevenue précise il est évident que le temps a passé, que le spectacle est la suite du précédent, quelques heures ou quelques jours, le temps n’a pas d’importance en un tel lieu.

Comme si le réalisateur lisait en eux pour adapter la représentation à leurs habitudes, qu’ils n’aient pas d’efforts à faire pour comprendre.

Comme si ?


 

C’est ce que je fais non ?


 

Plus de cris, même pas de rage dans les yeux du plus fort, sa raison n’est pas la meilleure, elle est absente, la folie vint à son aide. Chacun obéit à un schéma qu’il n’a pas voulu mais logique, le plus fort se nourrit du plus faible tant qu’il conserve sa force, viendra le moment où le nouveau aura un instinct plus affirmé, une force plus grande, les rôles se renverseront, simple substitution, les acteurs paraîtront autres mais les rôles eux, et sont eux qui comptent, n’auront pas été changés.

La victime paraît dormir, pour elle le temps prend une autre signification, il doute, refuse, son esprit ne s’est pas éteint, il s’est seulement éloigné.


 

L’esprit veut briser ces habitudes, oublier qu’il devra reculer pour affronter ce qui lui fit peur au point qu’il voulut s’éteindre.

Pourquoi perdrait-il ?

Revenir au passé, pour comprendre, savoir et admettre.

La vérité est au fond du puits.

Me fait-elle peur ? L’après m’effraie, mais il ne sera pas le plus fort, le puits ne m’a pas détruit même s’il lui reste une chance, saisir mon esprit et le garder, le broyer dans des envies répugnantes, des désirs putrides, ludiques mais dominés. La folie ne peut plus me battre ni le réel m’effrayer. Reste l’ailleurs ! Une Vie accessible. MA vie !

Je me parle d’une autre vie, la mienne !

Merci Louis !


 

La sommaire lame d’os déchire difficilement le mollet. La victime regarde, c’est un spectacle, ce n’est pas elle. Le sang est chaud, rassurant.

Elle sourit.

Une bouche s’ouvre sur un hurlement muet, le commissaire ne sait plus s’il est l’agresseur ou la victime, s’il serait prêt à tout sacrifier pour survivre, y compris lui-même.

Il perçoit la douleur de la chair arrachée, il jouis de cette viande dans la bouche, de la mastiquer en jouissant des heures de vie qu’elle représente. l’organisme s'en satisfait, l’exploitant pour durer davantage.

Son père avait-il vu cet endroit ? Il n’était qu’un pion qui le comprit un peu tard. Et lui ? capable de tout encaisser jusqu’à désespérer s’y perdre.


 

Et moi ?

La question vaut d’être posée ! l’abîme est ouvert en moi. Quel esprit faut-il pour imaginer cela, pour contempler ce spectacle sans émotion ? Sait-il qu’il s’agit d’une apparence, que derrière une vérité attendant d’être comprise ? Je pense, ou veux penser, qu’il ne s’agit que de cela. Le plaisir de tuer a disparu, l’excitation de la description des scènes atroces. Quelque chose a changé, je suis différent. Plus proche de ma vérité, elle seule m’importe. Ce que je suis plutôt que ce que je veux, ou crois être.

Être... ou ne pas ?

Choix difficile, la douleur me taraude, je l'exploite jusqu’à l’ultime trace de lâcheté, d’envie d’être loin de ces impressions qui me nourrirent avant de m’empoisonner, à moins que ce ne soit l'inverse.


 

Il voit son père arpenter ce terrain, et les colons qui, peut-être, ignoraient ce qui s'y cachait mais en perçurent les effets en cédant leurs pulsions meurtrières. Créatures faibles, incapables de maîtriser un appétit qui se retourna contre eux pour les pousser à s’entretuer jusqu’à ce que le dernier expire à son tour et que le silence revienne, temporairement.

Et avant ?

Cette construction est antérieure à la venue des populations d’Asie. Il n’a pas envie de savoir, appelé par une voix gorgée de promesses il fit construire la maison, creuser le sol et dégager le puits, du reste qui le combla ? Question sans importance. Il y descendit, s’y sut accueilli, ainsi est-on souvent prêt à tout parce qu’enfin une main se tend, une oreille se montre attentive, que l’on entend les mots que l’on désirait plus que tout.


 

Dans quel puits me faudra-t-il descendre pour les entendre ?

J’y suis, entouré de parois nues, pleines d’échos, d’envies repoussées et de promesses non tenues. L’espoir était là, vivant, tiède, accueillant ; ses bras se firent doux, ses cuisses attirantes. Est-ce une victoire d’en garder l’envie pour la vivre en mots ? Et pour qui ? Céder à l’appel de la démence n’apporte qu’une souffrance supplémentaire. Je suis spectateur, ne pas descendre, ne pas le vivre par procuration, m’y jeter n’aurait rien résolu et je n’en ai pas envie. L'aurais-eu que je l’aurais fait, en lieu et place des mots j’aurais utilisé un instrument plus tranchant,le sang aurait coulé, mon esprit s'y fut noyé.

L’imaginer est un jeu, un risque semblant gratuit, semblant...

Génie s’appelait cette enfant, découverte après dix ans de réclusion dans une chambre, seule et abandonnée, sujet d’études, à peine humaine pour ceux qui l’utilisèrent, sujet de thèses et autre balourdises.

Plus l’autre promet plus il ment, et il le sait.

L’autre… Le jeter au fond de ce puits, le, la, regarder souffrir, mourir lentement, ou détruire son corps et son esprit, j’aurais pris du plaisir, un temps, à massacrer, à déchirer, à regarder dans son regard l’éclat d’une folie qui n’eut été qu’invitation à la mienne.

Il arrive qu’il soit trop tard pour apprendre, pour se défaire du passé, le cocon est devenue une cage, l'âme craint de s'extraire d'une sécurité mensongère, avant de s’exposer à une lumière implacable.

Suis-je handicapé, mutilé ? Une part de moi ne fut pas nourrie, atrophiée, elle est enfermée, isolée, momifiée par une souffrance fondatrice. Comment la ranimer ? Corrompue elle gangrène l’esprit. elle veut tout envahir, tout ronger, jusqu’à la conscience même de soi. Je cherchais cela dans ce puits, un miroir, reflet d’une âme torturée luttant pour tenir un peu plus, hantée par cette malédiction qu’est la vie, ce rêve que demain apportera une solution qui ne viendra plus, ni au-delà du puits, ni en lui, ni par le crime, ni par les mots. Ma mort serait une solution, mais ensuite, que reste-t-il de soi ?

Une chambre close, attachée sur une chaise-pot… Plante organique sans esprit, l’oublier jusqu’à s’oublier, jusqu’à oublier d’oublier. Dans l’ombre des murs il n’attend que de pouvoir revenir.

Quelle part de moi n’a-t-elle pas grandie ? Je devine quelle charogne je transporte dans mon esprit, ce jumeau est quelque part, au fond du puits, mieux, il EST ce puits !

Il hait ? Non, ce puits fait partie de moi, me sourit de ce qu’il me proposa et que je sus et/ou pus saisir.

Non, non ! Pourquoi penser à l’avenir ? La chute ne se décide pas, elle se constate, et encore, j’en doute, elle offre une émotion effaçant les autres, elle est faite pour cela, la peur glisse, disparaît, mais tomber c’est arriver quelque part, se réveiller dans un monde où l’atroce marque chaque instant, où l’abominable devient nourriture, pensée obsédante jusqu’à broyer l’esprit si lentement, que le temps disparaît et apparaît la plus sombre des malédictions, l’éternité !

Belle formule, j’en suis fier, ou devrais l’être, si elle n’était pas si vraie, si je ne savais pas ce qu’elle signifie, ce qu’elle est de ma chair que j’arrache pour la transformer en mots, pour m’en nourrir, ainsi suis-je bourreau et victime à la fois, seul moyen d’avoir le temps de trouver la sortie si c’est encore possible, si je ne suis pas prisonnier entre une démence délaissée et une lucidité introuvable.

Génie ? Ce nom sonne comme une moquerie promettant de combler chaque vœux. Impossible, alors autant l’abandonner, ce n’était pas une lampe, les autres n’étaient pas des lumières. Entomologistes mentaux prêt à tout pour découvrir ce qu'ils ne comprendraient jamais.

Ne les haïssons pas, ils ne savent ni ce qu’ils font ni ce qu’ils sont, du reste ils ne sont rien, ainsi est homoncule celui qui se veut grand, nourri de savoir pour contenir l’univers en une pensée.

Une quoi ?


 

Est-ce son père derrière l’apparition, géniteur jeté dans ce trou pour y mourir de faim, s’y dévorer peut-être, juste retour des choses.

Juste ? Ce mot a-t-il un sens ? Chacun a une opinion en fonction de ses aspirations ou renoncements, acceptant si l’autre en fait autant.

Ils regardent, terreur adaptée à chaque spectateur apportant ses (p)références. Ainsi la vie est-elle un écran sur lequel chacun voit ce qu’il peut et refuse d’admettre qu’un monde différent puisque exister, refusant de voir que l’écran est fait des barreaux d’une cage.

Est-ce son père ou plus répugnant encore qu’il aurait jeté, fœtus d’une conscience rêvant d’une époque refusant de s’éteindre dans un être craignant d’évoluer ! Le temps ne coulera jamais à l’envers et la naissance viendra dans un cri que peu supporteront.


 

Qui pense cela ?

C’est moi, qui d’autre ? Ce n’était pas un fœtus qui se tenait là mais une enfant, une enfance, enfermée, n’ayant jamais grandie, espérant, à tort, que cela serait possible. Non, il est trop tard, c’était ainsi il y a presque dix ans, ça le reste, pourquoi y aurait-il un changement, de qui viendrait-il ? Comment savoir ce que nul ne vous apprit ?

Pour qui sait facile de donner un avis, de conseiller, j’ai appris à copier, à aimer, mais à l’intérieur seul crie le passé, les souvenirs courant le long des parois du puits.

Une enfance souriante, espoir d’un avenir, envie d’y croire, le sentir se déliter, détruit par les autres. Mieux vaut rester seul, ne rien attendre, disparaître à ses propres yeux.

Tout s’estompe, le puits s’efface comme s’il n’avait jamais existé, les sons s’éteignent, instantanément. A croire qu’il ne s’était rien passé.

Rien… Quel joli mot.

Ce serait dommage pourtant, puits de souffrances, empli d’un sang noir et glacé n’ayant jamais séché faute d'avoir été reconnu, accepté ; promis à ne jamais l’être.

Promis à ne jamais être.

Lumière de l’aube naissante. Le salon pour décor, dehors, la plaine, les montagnes plus loin, des forêts partout, décor bucolique après ce à quoi ils viennent d’assister, de vivre.

- C’est…

 

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Bienvenue sur ce blog ! Vous y découvrirez mes goûts, et dégoûts parfois, dans un désordre qui me ressemble ; y partagerez mon état d'esprit au fil de son évolution, parfois noir, parfois seulement gris (c'est le moins pire que je puisse faire !) et si vous revenez c'est que vous avez trouvé ici quelque chose qui vous convenait et désirez en explorant mon domaine faire mieux connaissance avec les facettes les moins souriantes de votre personnalité.

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