Les Cahiers de Science & Vie No 150 – Janvier 2015
Femmes savantes
Deux femmes dominent le cycle arthurien, Morgane et Viviane. La première est maléfique, experte en remèdes mais aussi en poison, Viviane est une enchanteresse qui voit l'avenir dans les astres et attise les passions dans le cœur des hommes. Elles sont aussi, et surtout, l'incarnation du rôle des femmes dans l'histoire des science et du peu d'entre elles qui passèrent à la postérité.
Dans la préhistoire la division sexuelle du travail implique que la cueillette soit réservée aux femmes. Logique qu'elles aient été les premières botanistes et guérisseuses, aucune trace venue du passé ne permet de les sexualiser pour dire quel savoir ou activité était masculin ou féminin.
L'écriture seule permet de garder traces des noms et des actes. Ainsi en Égypte une stèle de Gizeh révèle que sous l'Ancien Empire, Peseshet dirigeait un corps de femmes médecins et délivrait des diplômes aux sages femmes. En Mésopotamie, une tablette d'argile donne le nom de la première chimiste de l'histoire, Tappouti. En 1200 Av JC elle était à la tête de la fabrique de parfums du palais royal de Babylone.
De la Grèce à Rome l'antiquité conserve le nom de femmes savantes qui effleurèrent la postérité sans l'atteindre. Théano, élève puis femme de Pythagore, Cléopâtre, une homonyme,, qui rédigea un traité sur les maladies des femmes, Marie la Juive, alchimiste à l'école D’Alexandrie et inventa le ''bain-marie''... Les femmes dans l’antiquité sont confinées dans l'univers domestique, Aristote théorise l'infériorité du sexe féminin, à ses yeux elles ont le cerveau trop froid et humide pour raisonner, inutile donc qu'elles apprennent plus que le minimum. Peu d’institutions acceptent les femmes. L'école de Pythagore, celle d’Hippocrate font partie des rares dans ce cas. Les femmes sont souvent limités à la gynécologie, la cosmétique ou l'alchimie, ou doivent, tel Agnodice, se déguiser en homme pour exercer la médecine. Hypatie qui révisa et réédita les Éléments d’Euclide fut lapidée par les premiers chrétiens d'Alexandrie.
Pourtant le christianisme des premiers siècles se distingue par sa tradition d'égalité et ouvre des monastères mixtes et des couvents prestigieux où les femmes peuvent s’instruire et exercer une influence intellectuelle et politique. Comme le dit Hildegarde de Bingen, ''Ce n'est pas la science qui offense Dieu, mais le mauvais usage que certains en font''.
Pourtant l'Église finira par exclure les femmes femmes du savoir, l'université de Paris n'admet que des hommes comme élèves. Plus tard l'Inquisition veillera à ce que le savoir leur restant accessible soit réprimé et déconsidéré. La réforme anglicane d'Henri VIII fermera les couvents, seules Salerne ou Bologne dispensent encore leur enseignements humaniste aux femmes de la noblesse italienne. L'Occident chrétien, aux mains des hommes, se ferme aux femmes. Quand quelques unes se risquent à la recherche scientifique c'est dans l'ombre d'un père ou d'un époux qui s'emparera de leurs travaux. Il faudra attendre le XVIIè pour que, influencé par Descartes et les Lumières, es femmes de l'aristocratie française ou anglaise réclament plus de sciences.
Le retard n'est pas encore rattrappé.